jeudi 1 novembre 2018

La série « Irresponsable » diffusée sur OCS (Plock)






Ah les séries françaises…il suffit de prononcer ces 2 mots pour qu’on ait tous un frisson qui nous parcourt l’échine, en voyant apparaitre des flashs de Véronique Genest et feu Mouss Diouf en train d’enquêter sur le meurtre d’un notaire des Yvelines, ou pire en se remémorant ces moments gênants où Annette faisait du rentre dedans à Monsieur Girard…brrr.

Eh bien tout ça c’était avant ! Euh ben non en fait pas exactement...

Les fictions "Made in TF1" sont toujours très médiocres. France 3 et les honorables Capitaine Marleau ou Un village français fait dans le « sexagénaire only ». M6 préfère miser sur les recherches d’appartement, relooking ou autres recettes de cakes aux myrtilles. Alors France 2 peut être ? Chez Maupassant, 10 % ou Fais pas ci fais pas ça…pas un volume énorme mais des rendus honorables. 

Canal + et Arte ? Il manque toujours ce petit quelque chose…mais au moins ils tentent. On ne peut pas dire que H, Platane, Les Revenants, Mafiosa, Baron Noir ou P'tit Quinquin soient des chefs d’œuvres mais on est quand même pas mal à s’y être logiquement laisser prendre… 


Et OCS alors ? Ben OCS, ils produisent et laissent s’exprimer des gens que les grosses chaines précitées oublient sur le palier. Avec un budget par épisode qui ne dépasse pas les 100 000 €, il ne faut pas s’attendre à voir une Khaleesie bis chevaucher un dragon dans les montagnes du Jura. Mais à ce tarif, ceux qui bossent, qui créent, les passionnés, les vrais peuvent s’exprimer avec la liberté de faire dire à leurs personnages : « merde », « putain », « va chier », « connard », etc.

Et c’est donc ce qu’a pu faire Frédéric Rosset, le trentenaire créateur de la série Irresponsable, passé avant par le prometteur cursus « création série télé » de La Femis.

A l’instar de Missions ou Les grands autres séries réussies et produites par le bouquet appartenant à Canal Plus et Orange, le format court est ici utilisé (épisodes de 26 minutes). 

2 saisons ont été tournées à l’heure où j’écris ces lignes et une troisième est prévue (prévoir une diffusion fin 2019).

Alors qu’est ce qui fait qu’à l’arrivée cette série sortie discrètement sur une chaine peu connue et avec un petit budget soit en passe de devenir culte ?

Le travail, le talent et l’exigence je dirais…A aucun moment, on ne ressent ce flottement propre à certaines créations faites avec peu de moyens. Il y a du rythme, les acteurs jouent juste, les dialogues claquent et les lieux de tournage sont très bien choisis...il ne faut pas forcément des millions de dollars pour arriver à ce résultat. Surtout s’il n’y a pas d’effets spéciaux ou cascades. 

Et puis surtout, il y a Julien. Le personnage principal interprété par l’incroyable Sébastien Chassagne, l’irresponsable donc. Ce trentenaire tellement de notre époque. Intelligent, sensible, marrant, talentueux, plein de vie et d’empathie mais qui refuse de devenir adulte…

Le pitch ? Musicien glandeur basé à Paris âgé de 30 ans, Julien est obligé de revenir vivre chez sa mère à Chaville, en grande couronne, après avoir écumé et s’être fait jeter des canapés de tous ses potes, en bon squatteur et boulet de haut niveau qu’il est. 

Au programme de ce comeback (l’officiel, celui annoncé à Maman) : devenir adulte. Car, si comme la série le suggère, Julien semble avoir tout le talent nécessaire pour être musicien professionnel, il n’en a, pour ainsi dire, « pas le sérieux » nécessaire. Il va donc se trouver un boulot un vrai et un appart’ très vite. Mais d’abord il va se reposer et se remettre de ses aventures, avec un bon pétard 3 feuilles et sa playstation hein, il ne faut pas déconner non plus (voilà son vrai programme en fait, l’officieux) ! 

Cependant, tout ne va pas se passer comme prévu pour Julien. Entre une mère étouffante (interprétée par la formidable Nathalie Cerda) qui n’a rien de mieux à faire que de lui obtenir un entretien d’embauche pour qu’il devienne pion dans son ancien collège et le destin qui met sur son chemin Marie (Marie Kauffmann), son amour de jeunesse, mystérieusement disparue 15 ans plus tôt…et qu’il retrouve avec un fils (le sien…) de 15 ans prénommé Jacques (Théo Fernandez) …les vacances sur le canapé de Maman vont s’avérer plus mouvementées que prévues.

Julien va cependant s’accrocher…à sa manière. Il veut être le père de Jacques (avec qui il va nouer une véritable Bromance de BFF fumeurs de pétards), reconquérir Marie et être un bon fils. Voici le point de départ qui va faire la réussite des 2 exceptionnelles saisons de 10 épisodes chacune. 

Les situations cocasses s’enchainent dans la vie de notre héros entouré par une flopée de second rôles réalistes et bien interprétés (mentions spéciales au grand Sam Karmann dans la saison 2 et à Vincent Steinebach dans le rôle d’Adrien le flic pote bienveillant mais légèrement souffre-douleur de Marie et Julien). On est vite pris d’une folle sympathie pour tout ce petit monde. 



Car c’est avant tout ça le charme d’« Irresponsable », Frédéric Rosset parle de nous avec talent et brio comme a pu le faire Thomas Cailley dans le film « Les combattants » par exemple. Nous, les gens normaux, la classe moyenne qui vivons la plus grande aventure humaine : le quotidien.  Si Julien nous fait rire, il nous émeut aussi dans sa maladresse lorsqu’il cherche à reconquérir Marie devenue professeur de français ou quand il assiste au conseil de classe de Jacques…complétement largué sur les us et coutumes de ce genre de rendez-vous père/fils.

Irresponsable possède ce charme « lo-fi » des grandes premières œuvres qu’il s’agisse d’un album, d’un livre, d’un film…ou d’une série faite avec passion, sensibilité, naïveté et second degré. Culte je vous dis.

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