mercredi 26 avril 2023

Rum, Sodomy & The Lash des POGUES chez Densité

Au cours des années 80 le rock irlandais est bien vivant et florissant, les Undertones/That Petrol Emotion, les Hothouse Flowers, Microdisney, etc, et bien sûr le groupe de sauvages qui nous intéresse ici : les Pogues !





Dans ce nouveau volume Discogonie consacré au deuxième album des Pogues, le justement célèbre Rum, Sodomy & the Lash, Yann Liotard reprend les codes habituels de la collection tout en ajoutant une longue et foisonnante introduction d'une trentaine de pages.
D'abord en rappelant l'histoire du groupe, ses racines rock, folk et surtout punk. Oui punk, et comme il faut, il n'y a qu'à se pencher sur les paroles et l'évidence est sous nos yeux. Des bips à la radio et des coupures à le télé, et pas seulement pour grossièretés. Suivent quelques pages sur la musique irlandaise, sa place et son importance dans le pays et en dehors ; puis sur Stiff Records, label de Ian Dury, de Madness et d'autres parmi lesquels le producteur de cet album, Elvis Costello, et donc des Pogues.

« L'irrespect. L'irréverence. Les Pogues dérangent le Landerneau parce qu'ils revisitent un genre bien défini : le folk irlandais. Si la tradition est respectée en matière d'instruments et de chansons, les punks n'ont pas perdu leurs particularités. Et leur habitude de se débrouiller, de faire avec les moyens du bord se heurte autant aux producteurs trop dirigistes qu'à des codes trop arrêtés. »




Après un généreux détour par la pochette où on apprend l'origine assez peu glorieuse du titre de l'album, on pose le disque sur la platine tout en lisant Y. Liotard passer les douze titres à la moulinette.
L'auteur évoque au gré des chansons les légendes, la mythologie, l'histoire de l'Irlande et de sa musique, l'alcool, la migration des irlandais, le hurling, le monde ouvrier, les hostilités avec les anglais et Thatcher, etc, tous thèmes des chansons de Rum, Sodomy & the Lash. Il revient également sur le rôle de Costello qui en tant que producteur a surtout cherché à retranscrire l'énergie scénique du groupe.
J'ai bien sûr été plus attentif à certains morceaux de ce disque que je fréquente depuis longtemps, pas depuis sa sortie mais presque. Je n'écouterai plus jamais « The Old Main Drag » et son chant faussement bancal de la même façon. C'est encore plus tragique que ce que j'imaginais, le pauvre gamin de l'histoire a bien malheureusement sa place sur le radeau de la pochette ; c'est si bouleversant que je suis sûr qu'il en est tombé...





« L'alcool est indissociable de la carrière des Pogues. Rien d'étonnant quand l'inspiration vient d'une musique irlandaise qui a son lot de chansons à boire. Écouter une chanson des Pogues, avec la voix de Shane McGowan, c'est vivre une mise en abyme : un homme qui boit parle d'un homme qui boit. Boire, oui, mais en se consumant avec modération. Boire, là-bas, boire, mais quoi ? Piocher dans la discographie des Pogues et de ses succédanés nous plonge dans un arrière-bar. »

Parmi les reprises du disque il y a bien sûr l'emblème du groupe, « Dirty old town », qui ouvre la face B du vinyle. L'histoire, l'écriture et la postérité de cette chanson, aussi irlandaise que moi, la rendent encore plus belle et plus triste, si c'est possible.
Je prête une attention particulière à « And the band played Waltzing Matilda » qui a toujours eu ma préférence sur l'album. Émouvante reprise de cette valse funèbre antimilitariste écrite par Eric Bogle, un écossais émigré en Australie.
On termine le livre avec un bonus absent du vinyle par manque de place, le génial instrumental sifflé « A song for Paddy Garcia » au goût de western spaghetti, l'occasion de rappeler l'influence d'Ennio Morricone sur le groupe.





Il y en a des choses a raconter sur cet album paru il y a 38 ans déjà. Yann Liotard n'en est pas à son premier livre, on sent une grande aisance dans l'écriture, assez personnelle d'ailleurs : s'il y a bien quelques paragraphes techniques, il n'y a aucune froideur et même une bonne dose d'humour.
Une écriture aussi dans laquelle transparaît tout l'amour de l'auteur pour cet album et ce groupe, c'est indéniable.


NicoTag




mardi 11 avril 2023

Écoutons nos pochettes, le livre, interview et chronique

Coup double sur le blog avec la parution de l'anthologie Écoutons nos pochettes chez Densité. D'abord quelques questions à Gilles de Kerdrel initiateur du projet, puis une chronique du livre. En préambule, pour les malheureux qui n'auraient pas connaissance de l'existence du site, voici par quoi on y est accueilli :

QUAND VOS POCHETTES RACONTENT VOS HISTOIRES

Objets de cultes, de convoitises, de scandales, d'art et de légendes, tout a déjà été raconté sur les pochettes de disques. Tout, sauf ce moment de notre vie auquel l'une d'entre elles est à jamais liée.
Écoutons nos pochettes publie vos récits personnels (une love affair, une révolte, un trip, un ego en devenir), témoignages du pouvoir de résonance d'une pochette dans nos cortex émotionnels.



Au départ d'Écoutons nos pochettes il y a un album en particulier. Comment cet album te mène à la création en 2016 de la page facebook Écoutons nos pochettes puis du site ?
Ah, tu parles du premier Stranglers, Rattus Norvegicus. J’ai ouvert la page facebook après avoir réuni une dizaine de textes… et... trouvé le nom du projet. Le site est venu après, lorsque les lectures ont commencé à se mettre en place. Je voulais quelque chose de plus personnel qu’une simple page facebook.

Les autrices et auteurs sont très divers. Certains sont connus ou travaillent dans la musique, des journalistes spécialisés, des romanciers, d'autres sont d'anonymes amateurs de musique. Comment ces personnes arrivent jusqu'à toi et comment choisis-tu les textes ?
L’aspect participatif, c’ est la base d’Écoutons nos pochettes, et c’est le rôle de la page facebook. Elle me permet de rentrer en contact avec des personnes dont l’écriture ou la personnalité m’intéresse. Ou, à l’inverse, à des personnes de me proposer un texte. Les lectures publiques provoquent également l’envie d’écrire aux gens qui viennent les écouter.
Je ne choisis pas en fonction de la pochette ou du groupe, c’est le texte qui prime. Donc si l’histoire m’embarque, je prends !

Tu as écrit plusieurs textes qu'on trouve sur le site, sur Ian Dury ou Étienne Daho. Tu es dans le livre avec Metal Box de PIL (une sublime vengeance d'ailleurs). Sur quelles autres pochettes pourrais-tu écrire ?
Bonne question ! Mais la vérité est que je n’ai pas tant de souvenirs que ça. Et pour l’instant, Écoutons nos pochettes se nourrit mieux des textes des autres que des miens.

Comment est né le livre ? Qu'est-ce qui a guidé le choix des textes publiés dans ce livre ?
Le livre est une proposition d’Hugues Massello, des Éditions Densité. On s’est mis d’accord en 10 minutes. Je lui ai fait une liste d’une quarantaine de textes que l’on a ramené à 33… plus 3 bonus. Mon choix s’est porté sur des textes qui me tenaient à coeur, mais j’aurais préféré en mettre plus. Ça n’a pas été facile de trancher… Pour la conception graphique, je voulais travailler avec Pascal Blua et pour les photos, avec Carole Charbonnier.

Il y a d'abord les textes puis les lectures publiques, les podcasts et la radio, maintenant ce livre. C'est quoi la suite ?
La suite, c’est bien sûr des nouveaux textes et des idées autour du roman graphique et du film. Mais c’est trop tôt pour en parler...

Pour finir, quels sont les disques et les personnes que tu aimerais voir sur Écoutons nos pochettes ?
Je n’ai pas vraiment d’attente sur telle ou telle pochette, même si j’aimerais bien élargir au-delà de la trilogie Rock/Pop/Punk. Si tu veux des noms, ça m’est égal, tant que le texte me plait. Ah si, j’aimerais bien des textes d’auteurs anglais, allemands, etc. Et si tu as les contacts de Pj Harvey, Patti Smith, Nick Cave (entres autres), je suis preneur…:)




De courts textes qui se situent sur une ligne de crête avec d'un côté l'autobiographie et de l'autre la critique musicale, c'est à peu près ça Écoutons nos pochettes, le site et maintenant le livre. Si l'ensemble de ces textes causent bel et bien de musique, d'un album, d'une pochette en particulier, chacun raconte un bout de la vie de son auteur, une de ses émotions instantanément remémorée à l'écoute du disque.

Après une préface de François Gorin, le livre démarre avec ACDC, Christophe Paviot et sa grand-mère. Ce premier texte éveille aussi mes propres souvenirs, pourtant ACDC et moi... Ce sera le cas avec d'autres albums, d'autres pochettes, c'est une des constantes, une des qualités des textes choisis par Gilles de Kerdrel pour ce recueil édité chez Densité. Ce n'est pas de la nostalgie, on est pas chez les anciens combattants, ça parle de musique donc d'émotions bien vivaces ; des albums sont capables de modifier fondamentalement la trajectoire de leurs auditeurs. La preuve : « Elvis n'était presque même pas encore mort, les Rolling Stones non plus, et voilà qu'un groupe tordait le cou à tout ce que je connaissais. » R. Rosebomb à propos de Down By The Jetty du Dr. Feelgood.

Il y a un vrai plaisir à voir les albums que j'aime accolés à des histoires que je pourrai faire miennes. Drift de The Apartments par Hugues Blineau, ou le Blackstar de Bowie par Sibylle Buloup qui fait partie des petits diamants semés dans ces pages.
Il y a aussi quelques rares pages où ça ne me touche pas, que ce soit l'album, l'histoire ou simplement l'écriture, rien d'anormal les textes sont nombreux.

Parfois cela me fait sourire quand j'entends parler de disque d'une vie. Pourtant ça existe. Pour moi c'est Dummy.  (Lisa Balavoine, sur Portishead)

Parmi toutes les plumes du livre, se trouvent quelques écrivains. Éric Pessan, Valérie Tuong Cong, Timothée Demeillers, etc ; et Philippe Marczewski, auteur de Blues Pour Trois Tombes Et Un Fantôme, des flâneries liégeoises farfelues et magnifiques, qui nous ramène ici au tout début de l'adolescence rebelle avec les Bérurier Noir. L'adolescence revient souvent dans le livre, à croire qu'on en sort jamais vraiment, où qu'on y fait les plus importantes découvertes musicales. Ce que raconte élégamment Pierre Lemarchand avec le visage de Standing On A Beach des Cure.
Impossible d'évoquer tous les textes-albums, ce serait trop long et ressemblerait à un inventaire. Il y a pourtant des incontournables. Celui où Lisa Balavoine raconte comment Dummy de Portishead traverse et échelonne sa vie depuis sa parution en est un. Idem ou presque avec From The Lions Mouth de The Sound pour Clara Feuillette. Il y a un vrai plaisir à voir des groupes comme Jack The Ripper, Orchestre Rouge ou Gilles Tandy et Les Rustics remonter le temps vers nous ; et quelques surprises aussi : les Poppys, Barbara, Aphrodite's Child.




Il y a trente-trois textes, autant que les tours par minute d'un album vinyl, mais comme dans les CD, il y a des bonus. Trois textes viennent s'ajouter dont un qu'il ne faut pas louper sur les Red Hot Chili Peppers écrit par Sarah Kendous. Je l'avais lu sur le site, mais ici sur papier, sa portée est différente, bien plus puissante.
Avant les bonus, le trente-troisième texte est l'œuvre de Dominique A. Il est plaisant de le retrouver ici à l'écrit, d'autant qu'il évoque un disque et une chanteuse rare, Molly Drake qui n'est pas seulement la mère de Nick.

Eh ben voilà, on y est : c'est la guerre. Et comme un con, je suis déjà dans le camp des vaincus. Après quelques années de cohabitation faussement pacifique, l'armée CD vient de dézinguer le peuple Vinyle, et tant pis pour les nazes qui ont un problème avec la modernité : le nouveau monde avance sans eux, sans moi. Et Lou Reed, ce salaud, s'en tape le coquillard... (Fred Le Falher, sur Gilles Tandy et Les Rustics)

Un mot sur les illustrations, les clichés en noir et blanc des pochettes donnent une belle unité à l'ensemble, ils sont l'œuvre de Carole Charbonnier qui signe une page furieuse sur 3 Supernature de Cerrone et sa pochette en forme de malaise. Quant à la couverture/pochette, elle est l'œuvre de Pascal Blua, auteur lui aussi, sur l'album Kings Of Convenience du groupe du même nom. On lui doit déjà des pochettes pour Olivier Rocabois, Howe Gelb et bien d'autres.

La bonne nouvelle c'est que le site est riche au point d'établir un bon sommaire pour un autre volume. On pourrait y retrouver d'autres textes de Lisa Balavoine ou de Pierre Lemarchand, des albums comme For Your Pleasure de Roxy Music ou Gasoline Alley de Rod Stewart, et des surprises comme Michel Sardou.
Écoutons nos pochettes, l'anthologie, c'est une discothèque idéale : les 33 disques, plus les bonus, qu'il faut avoir lu.

NicoTag




L'adresse du site pour proposer vos textes : ecoutonsnospochettes.com
À retrouver également sur facebook et instagram
Photos noir et blanc : Carole Charbonnier
Couverture : Pascal Blua

mercredi 30 novembre 2022

Pit Samprass, Nasty Samy et Go Public! La scène indie rock des années 90/2000 toujours là ! (Plock)


Cette année 2022 aura été riche du côté de la scène "punk-hxc-noise-indie rock" française. Le nombre d'excellentes sorties est assez incroyable et surtout maintenant l’histoire s’écrit avec plusieurs générations de musiciens ; on a des groupes avec des zikos de 20 à 50 piges…voir plus !

TH Da Freak, Wonderflu, Zir Pachet, Off Models, WSM ou encore RADIANT (on cite ceux qui nous viennent spontanément mais on en oublie pas mal !) ont tous sortis des albums ou EP dernièrement assez incroyables !

Et puis les anciens sont toujours là aussi ! Les membres de la fameuse scène des 90’s n’ont jamais lâché l’affaire comme en témoigne 3 excellents albums sortis récemment et sur lesquels on va axer ce petit focus...

 

lundi 25 juillet 2022

Thomas VDB - Comedian Rhapsodie (Flammarion) - Myfriendgoo

Un humoriste fan de rock en 2021, on ne peut pas dire que ce soit le summum de la hype. Pourtant, il a son petit succès, le Thomas VDB. Certes, il ne parle pas que de rock, il parle beaucoup de son quotidien, et même de plus en plus de politique, influencé par sa compagne Audrey Vernon et de ses collègues humoristes gauchiasses de France Inter. Mais sa passion pour le rock ne manque jamais d’affleurer dans ses sketches et ses chroniques, jusque dans le très amusant jeu radiophonique qu’il a animé à l’été 2021, subtilement intitulé “Qui veut gagner la flûte à bec”. Ceux qui le suivent depuis longtemps connaissent plus ou moins son passé de journaliste chez Rock Sound, puisque l’un de ses premiers one-man-show, “En rock et en roll”, en parlait déjà. Mais avec ce premier bouquin, Thomas fait son coming-out intégral : oui, il a adhéré au fan-club français de Queen, puis à celui de The Cult, durant son adolescence. Oui, il a truandé RTL en utilisant ses potes pour gagner plus de CD au jeu du coin-coin de Francis Zégut. Oui, il a monté lui-même le fan-club français de Korn, à 19 ans, ce qui lui a valu une poignée d'années plus tard de se faire embaucher comme journaliste par Yves Bongarçon à la rédaction du magazine Rock Sound, avec comme seules autres références le bac et trois inscriptions en première année de DEUG d’anglais.

vendredi 24 décembre 2021

Ah, te voilà, toi ?

C'est la période des fêtes de fin d'année, et alors que les bourgeois se dorent la pilule sur des îles de la Méditerranée, les prolos comme votre serviteur se retrouvent cloîtrés chez eux à bouffer des escargots en boite de conserve dans le froid banlieusard, encerclé par le coronavirus. Comme les temps les plus difficiles sont propices à l'ennui et à la nostalgie, et aussi parce que j'ai vu que le "Old town Road" de Lil Nas X était un carton planétaire il y a quelques temps, j'ai décidé de vous offrir pour Noël la réhabilitation des pionniers du country rap : Les Musclés.


Tout le monde connaît Les Musclés pour leur engagement auprès de la communauté rustique avec "La Fête au village". Gaudriole beaufisante pour beaucoup, le morceau n'en est pas moins un plaidoyer pour les valeurs simples de la campagne, anticipant de 30 ans la fuite des zones urbaines par les bobos parisiens (Nova, par exemple, s'est exilée je ne sais plus où pour ne plus manger de jambon sous vide). Ce dont on se souvient moins, c'est de leurs prises de position sur des sujets beaucoup plus polémiques. 

Ainsi, tout au long de leur courte carrière, Les Musclés (et leur parolier Jean-François Pourri, punk s'il en est) ont subtilement glissé des allusions à des problématiques de société sous couvert de rigolade : démilitarisation ("le vieux clerc de notaire/qui a connu toutes les guerres/a sorti son fusil pour tirer des coups/nous aussi"), drogue ("la fille du pharmacien/nous avait préparé des pilules pour nous remonter/on les a avalées"), liberté sexuelle ("il paraît même que la mémé est allée se coucher/sous la tente du grand René"), antiracisme ("Merguez Party" ou les merguez sont évidemment une métaphore de la culture maghrébine, se conclue par "Reste pas seul dans ton coin/viens boire un p'tit coup[...]/et vive la France") et politique ("y a que Jean-Marie qui nous fasse de la peine/alors va-t-en Jean-Marie la peine !") Ils ont également remis l'intelligentsia pseudo décalée de Canal+ à leur place avec leur pamphlet "Antoine Déconne".

Ainsi, la chanson qui nous intéresse ici est elle un brûlot politico-social, mais elle représente aussi une expérimentation stylistique rare au sein de leur discographie, les balbutiements du hip hop rural et à ma connaissance la seule chanson au monde à mêler rap et yodel : "Le Rap des Musclés". Outre le courage artistique de s'essayer à un style moderne et très loin de leurs codes à une bonne quarantaine d'années chacun, cette œuvre ne fait aucune concession sur le fond ni sur la forme. 

Le titre s'ouvre sur un rythme synthétique typique des productions AB pour mieux désarçonner l'auditeur en assénant le message de fond dès les premières secondes : "c'est pas parce qu'on est né dans un village défavorisé/qu'il faut considérer qu'on n'a pas le droit de s'amuser". Détresse sociale et description crue de la réalité des petits villages, critique solide et rime qui rime scandée par le groupe au complet pour en renforcer l'impact; une masterclass. 

Or Les Musclés ne veulent pas perdre l'auditeur profane avec un niveau technique trop élevé, ils contrebalancent aussitôt avec un "toi mon frère, toi ma sœur" volontairement simpliste sauf une petite variation finale forte et subtile comme la moutarde de Dijon, "surtout toi ma sœur viens avec nous faire la nouba". La phrase semble anodine, mais le terme "nouba" était déjà désuet dans les années 90, et permet ainsi au groupe de créer un pont intergénérationnel. Le rap des Musclés a vocation à être simple et universel, il le démontre par le fond et par la forme.

Alors arrive le refrain, aux paroles simples mais terriblement efficaces, un gimmick comme seuls savent en pondre les plus grands : "ah, te voilà, toi ! Yo Yo !" qui marquera durablement les esprits au point qu'on ne peut s'empêcher de le ressortir quand quelqu'un débarque avec du retard (je l'ai même sorti à mon n+2, une fois, ce qui m'a valu un licenciement. Ça aussi, c'est la force des grandes chansons !) Cependant, ce grand moment lyrical est aussitôt sublimé par le zénith musical du groupe, le sommet qu'il ne dépassera jamais : le yodel rappé. Quel autre artiste qu'Éric, le fléau du cassoulet, peut se permettre un tel moment de grâce ?

À partir de la, le morceau se répète ce qui n'est pas un défaut mais la preuve que le compositeur Pourri et l'arrangeur Gérard Salesses ont une maîtrise sans faille du format pop. Mais il ne se contente pas de copier coller, les artistes en profite pour glisser une nouvelle critique au vitriol : "c'est pas parce que les riches ont de l'argent qu'il faut que les pauvres n'aient pas d'argent." La pensée révolutionnaire à la portée des enfants, du grand art. On citera aussi le très destroy "danse nue/jette tes vêtements/non pas les garçons, les filles seulement" qui préfigure Pussy Riot et représente un gros doigt d'honneur tendu au patriarcat. 

S'ajoute à cela un clip de haute volée avec une réalisation novatrice et à la pointe de la technologie. Je conclue ce texte avec un lien pour égayer vos fêtes en allant le regarder. C'est ça aussi, la magie de Noël ! 





Punk rock Jesus

Sean Murphy est une figure montante du comics indépendant. En écrivant ça, je vous ai tout et rien dit. Sean Murphy est une figure mont...